dimanche 8 février 2009

Marie-Hélène au mois de mars

On retrouve dans ce premier récit toute l'ardeur de style de Maxime-Olivier Moutier, avec ses images décalées et ses effets d'humour à froid. En trois mots, il vous fait un portrait, vous installe dans sa chambre, vous dépeint son désespoir. Tout à la fois.

Anéanti après une tentative de suicide échouée de peu, après une histoire d'amour échouée de beaucoup, il appelle le 911 et prépare ses valises. On l'interne dans cet étrange monde où règne l'ordre, dans ce temps d'engourdissement et de rationalisation. Avec les autres fous qui hurlent, les infirmières qui sourient comme des espionnes et les caméras partout. Avec le vide rédempteur qu'apporte chaque soir le somnifère convoité dès le matin. Faire l'expérience du vide, tenter de comprendre pourquoi elle l'a trahi. 

« Je vais devoir la baîllonner. Le matin, le soir, la fin de semaine, en lui parlant, en criant plus fort qu'elle, pour ne plus qu'elle répande son désordre. Lui parler, en lui faisant l'amour à répétition. Je vais devoir la baîllonner tout le temps. Je vais devoir acheter des kilomètres de ruban adhésif, pour mieux la baîllonner. Du ruban de qualité. »

« Je vais devoir attendre. Attendre d'avoir des hallucinations, pour passer le temps. Attendre jour et nuit que quelqu'un se décide à crever. Attendre un nouveau coeur. Un coeur de porc, à l'abattoir, au fond d'un seau. Un organe tout neuf, prêt à aimer Marie-Hélène une nouvelle fois. »

Roman autobiographique, l'auteur souligne dans sa préface que c'est de la fiction, lui donnant une gravité et une acuité qui saisit l'attention ; il ne s'agit pas d'un roman comme tant d'autres, d'ailleurs n'est-il pas sous-titré Roman d'amour ? Le roman d'un amour chimérique, d'un état de crise où s'exacerbe l'individualité. Comme une générosité, un altruisme scié à vif, un débordement d'amour qui conduit à la noyade.

3 commentaires:

Anna a dit…

J'ai lu ce roman d'amour alors que je n'y croyais même plus, à l'amour qui réussit à faire souffrir.

as-tu lu LA MÉMORIA de Louise Dupré?

J. a dit…

Je connais pas La Mémoria non.. Mais je note à l'instant sur ma petite liste "à lire". Merci !

Anna a dit…

Il y a DOULEUR EXQUISE de Sophie Calle.. aussi.

merveilleux!